Quatrième de couverture« Lundi 1. C'est l'odeur qui m'a réveillé, bizarre, m'arrachant à ma plongée profonde pour me ramener vers la surface de ma conscience. Je veux dire que je me suis réveillé avec une odeur dans les narines, incongrue, et qu'à ce seul indice je me suis souvenu de tout, tout de suite. Une odeur de pharmacopée, donc d'hôpital, vous sentez ce que je veux dire ? A ce moment précis, je me suis senti étrangement gêné aux entournures. Alors j'ai juste voulu déplacer un peu les draps, bouger la main. Et là, plus rien, nada, comme si je n'avais plus de mains » Extrait de
Mon Journal Mental.
Pas tout à fait mort... pas complètement vivant... les héros de Jean-Michel Calvez dansent avec la Faucheuse d'un côté ou de l'autre de la vie. Une danse colorée et changeante ! Les sept textes de ce recueil fantastique abordent la mort avec des approches étonnantes, parfois légères, parfois graves, mélange de drame et d'ironie. Et quand ils s'éloignent du grand final de la vie, c'est pour mieux sculpter les corps et explorer les âmes des artistes.
Après une demi-douzaine de romans (
STYx, L'Arène des Géants, La Boucle d'octobre...),
Manières Noires est le premier recueil de nouvelles de
Jean-Michel Calvez.
« Du drame à la comédie, tout est noir, mais ce noir se décline, se voit, d'une multitude de façons différentes. On rit, on tremble, on pleure. On ressent, beaucoup ; on goûte. Jusqu'au titre qui fait référence à la gravure, au polar, ou, qui sait, à la physique, avec la « matière noire », ces
Manières noires sont infiniment variées. » Extrait de la préface de
Lucie Chenu Manières noires comme le stipule la quatrième de couverture s'axe clairement vers le genre fantastique. On retrouve avec plaisir le style littéraire de
Jean-Michel Calvez, parfois poétique, souvent tranchant, mélange de romantisme et de gothique, au frontière de l'introspection, à l'orée de l'au-delà. Qu'ils soient revenants, zombies, errants, éthérés, ils nous donnent rendez-vous au coin d'une tombe, dans une fontaine ou pour un diner de famille. Tel est l'orientation de ce recueil dans lequel évolue la Mort.
Pour autant, on sera surpris de l'intégration des deux premières nouvelles qui n'entrent pas dans la cohérence thématique. Point de mort dans Manière noire mais un éclairage fort intéressant sur l'art. Un clair-obscur magnifique et sensuel qui, par associations d'idées m'a fait penser aux Belles endormies de
Kawabata ou encore à la
Femme tatouée (Film de 1981 de
Takabayashi). Dans Mon journal mental, la mort est omniprésente pour devenir une finalité évidente malheureusement. C'est une vision personnelle de l'état de végétation d'un être malade, enfermé dans son corps tel qu'a pu aussi l'exprimer dans son livre
Le scaphandre et le papillon de
Jean-Dominique Bauby.
Après ces deux ovnis constituant les deux premiers textes, le reste tend donc vers des mises en situation de la mort, de son implication, de ses conséquences au travers de personnages en mal d'être, en mal d'amour.
Entre réalisme, fantasme et gothique romantique,
Jean-Michel Calvez nous offre un aspect nouveau de son écriture mais qui garde la grandeur de sa plume. Seul bémol, on regrettera peut-être que les textes s'étirent au delà du dénouement vite perçu.
Jean-Michel Calvez Manières noires (Les 3 souhaits/ActuSF)