Îles mécaniques - Daniel Walther (2008)

De l'âge d'or à nos jours

Îles mécaniques - Daniel Walther (2008)

Messagepar erwelyn » Mercredi 22 Février 2012, 16h54

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ÎLES MECANIQUES
OU UNE DYSTOPIE SCIENCE-FRICTIONNESQUE*

Résumé :
Sur Terre, les guerres de religions ont fait rage. En 2086, des Aliens venus d’Alpha du Centaure ont permis aux terriens de se sortir de ce mauvais pas historique, mais en contrepartie de leur aide militaire, médicale ou technologique, ils ont désormais une main mise sur la planète.
Islandia Nova, une île flottante à la dérive. Holla : la capitale où s’entassent 90000 âmes.
Dans ce monde oligarchique, les grossesses sont contrôlées, les tortures et exécutions publiques, les micros disks ont remplacé les livres et les œuvres sont réécrites dans une forme érotique « pour une meilleure lisibilité ». Passable fonctionnaire-veilleur, Aslan Bork rêve en secret de quitter l’île. Slonka, sa compagne, rebelle par convention, est la nympho respectable de ce bouquin scienti-érotico-machiste. Et tous deux de se frictionner malgré les aventures dramatiques dans lesquels ils sont entraînés. Tour à tour, victimes et esclaves (sexuels), surtout elle, ou bourreau, principalement lui, ils seront amenés à fréquenter autant de personnages pervers. De la déviante Leonella, au commandant des Aliens Jarl Antol, en passant par le dissident alien Taran Gol alias Paul Moritz ou la tortionnaire lesbienne Trämal, ils sont tous le reflet de cette société décadente. Quant aux îles, dérivante, stellaire ou ancrée dans la terre ferme, elles représentent bien toutes les désillusions de ce monde en perdition qui ne demande qu’à exploser sous la rébellion.

THEMES : Dystopie

:arrow: Depuis des années Daniel Walther, qui a fait ses armes dans la revue Fiction et dans la défunte collection Anticipation au Fleuve Noir, revient avec ce roman dystopique et érotique. Déjà dans d’autres nouvelles ou romans, tous genres confondus, l’érotisme était omniprésent. Ici, il l’est encore plus au point qu’on se demande quel est de la science-fiction ou du sexe le genre qui motive l’autre.
Ainsi lisons-nous de la science-fiction érotique, ou un roman érotique science-fictionnesque ?
Par ce livre, en tout cas, Walther rend aussi hommage au roman de Jules Verne : L’île à hélice qui l’a manifestement inspiré. Et l’on trouvera quelques passages savoureux tel celui où le navire des héros en fuite est attaqué par un poulpe géant, clin d’œil sûrement à 20000 lieues sous les mers.
Pour autant, l’ouvrage est très irrégulier. Si l’univers dystopique y est très bien planté avec son régime oligarchique, sa Terre polluée et ses spectacles barbares, l’équilibre entre action et sexe est un peu branlant**. La trame qui démarre très bien, perd de son crédit avec des successions de scènes érotiques (toutes les 2 pages) qui laissent penser que les fantasmes de l’auteur ont pris le dessus au détriment d’un scénario de départ pourtant alléchant***.
Les dernières pages reprennent un souffle aventureux mais où les situations chaudes manquent toujours plus de crédibilité. Comme on dirait, elles tombent comme un poil pubien sur la soupe. C’est ce manque de réalisme qui dérange tout au long sauf si bien sûr on lit les Îles mécaniques non comme un roman anticipatif mais plutôt comme un roman de cul où toute situation est bonne pour déclencher la trique du héros. Le pauvre n’a malheureusement que cet atout pour survivre. Sa raison de vivre se limitant aux quelques lignes qui le décrivent parfaitement : « De rentrer dans le cursus honoris du Doge, de servir fidèlement la Loi et les Décrets de l’Oligarchie, de grappiller quelques miettes d’honneurs dans l’ombre des Maîtres, de refaire le « chien couchant » pour profiter des avantages d’une position sociale très moyenne, certes, mais relativement choyée. Pas d’autre ambition… »
Bref tel un découpage de film porno, les actions mettent plus en exergue les réflexions philosophiques que profondément anticipatrices de notre antihéros. Et du coup, le déroulé des évènements s’en trouve aussi malmené. Difficile de voir où l’on va ou plutôt comment on y va. L’escapade dans l’espace de Aslan et Slonka, devenus esclaves malgré eux du Commandant des Aliens ne nous permet pas de bien comprendre l’importance de cet épisode hormis encore les scènes érotiques qui en découlent.
L’écriture de Daniel Walther n’en n’est pas moins appétissante. D’un style cru et brut de fioritures dans les scènes de sexe, il peut aussi faire preuve d’une grande finesse de langage dans nombres de ces descriptions. Sans doute est-ce cette capacité stylistique qui permet de pardonner ses excès de fantasmes étalés et pas toujours de meilleur goût. Il ne manque pas d’humour non plus. La fin, des plus rocambolesques, rappelle ces contes noirs que le XIXème siècle nous a laissé en héritage ainsi que ces récits de voyages aussi exotiques que merveilleux des XVIIIème et XIXème. Et de se gausser également en revisitant les grands classiques, d‘Anna Karenine de Tolstoï à Guerre et Paix du même auteur en passant par La duchesse de Langeais de Balzac. Sans compter ces petits clins d’œil saupoudrés de ci de là (Paul Moritz) et son vocabulaire anachronique (viorne : arbuste, langotter : léchouiller, ergastule : prison, barbon : homme d’âge mûr, brouet : bouillon etc.), surtout dans les derniers chapitres.
Reste donc une œuvre correcte, sympathique mais qui aurait gagné à voir son scénario un peu mieux développé au détriment de certains passages dispensables.

*adjectif que l’auteur appréciera
** idem
*** idem
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